Le nouvel accord de coopération Renault-Nissan évoque pour moi la comptine enfantine « Un pas en avant … ». En effet je ne suis pas sûr que les acteurs sachent vraiment s’ils ont avancé ou reculé, au-delà des discours de façade.

L’accord qui prévalait auparavant, le RAMA (« Restated Alliance Master Agreement »), aux contours byzantins, ne tenait que par l’incarnation du pouvoir par un homme fort, Carlos Ghosn. Aujourd’hui, « place à la normalité » comme le dit Jean-Dominique Senard.

L’accord quitte désormais un monde Domestique, « le chef a dit », pour un Monde Civique, « la norme ». Le Monde domestique, qui a laissé se développer les dérives connues, avait le mérite de l’informel : « Carlos a dit … » suffisait pour débloquer des budgets, l’utilisation de brevets, … sans tomber dans un formalisme juridico technocratique. Demain, l’explication de « qui fait quoi, avec quels moyens, avec quel contrat, … » sera peut-être plus saine mais surtout plus longue.

Que faut-il alors penser des perspectives de coopération autour de ce nouvel accord ?

La première pierre d’une Coopération est une ambition forte, fédératrice qui dépasse les intérêts de court terme des parties prenantes.  

L’accord parle de « projets opérationnels à forte création de valeur ». La liste est longue mais elle n’engage que ceux qui voudront vraiment les réaliser. Le nouvel accord prône une union libre entre les deux constructeurs sans but commun fédérateur si ce n’est des intérêts bien compris au coup par coup.

Dans ce contexte, où le sens commun est limité, tout va reposer sur la manière dont les Managers vont fonctionner, c’est-à-dire dans quel Monde les Manager vont penser et agir.

Et là, il faut tenir compte du passé qui a laissé des traces « C’est comme si on demandait à 10 000 couples divorcés de se remettre ensemble » comme le dit un décideur dans un article récent des Echos.

Par ailleurs, si cet accord se vit dans le Monde Civique avec une armée de juristes et de comptables, il a fort peu de chances de produire les résultats escomptés.

Pour éviter cette situation, la tentation serait de vivre la coopération dans un Monde Marchand, purement transactionnel, au cas par cas, où le plus fort à l’instant donné gagne, au risque de favoriser une opposition systématique.

Par exemple, autrefois les grands marchés étaient partagés selon une règle « Leader Follower » et l’imprimatur de Carlos Ghosn. Demain, le fonctionnement annonce « une mise en concurrence saine » entre les deux équipes. Sous la pression des résultats imposés à chaque partie, la concurrence risque de quitter rapidement le terrain du gentleman agreement pour devenir insidieuse voire frontale.

L’équilibre entre ces deux Mondes Civique et Marchand qui se critiquent volontiers ne va pas être simple à construire et à faire vivre.

Il va demander une gouvernance très précise, une « poigne de folie » selon les mots d’un décideur. Mais il va surtout exiger un Monde Commun, même diffus, pour permettre des approches de type « don et contre don », en dehors d’un système comptable et juridique. C’est par exemple le sujet de la mise à disposition des brevets de chacun des groupes. Si Renault semble prêt à jouer le jeu de la mise en commun, il semble que Nissan soit beaucoup plus réticent.

En effet, la coopération nécessite la prise de conscience objective du besoin de l’autre. « Je ne peux pas atteindre seul mon objectif (qualité, coût, délai, ...) et donc j’ai besoin de l’autre, même si je ne l’aime pas ». Comme les Russes et les Américains l’ont fait et le font toujours, pour le succès de la station orbitale internationale, l’ISS.

Si Lucas de Meo semble conscient de ce besoin, tout en voulant rester le plus libre possible, le patron de Nissan, Uchida, ne se livre pas et va devoir composer avec des visions isolationnistes fortes.

La question posée ici est celle de l’intensité de la coopération, qui dépend bien sûr des parties prenantes. Pour évaluer cette intensité nous proposons notre échelle des accords de coopération, de 1 à 5.

1. Pas de coopération. Les parties, pas encore « prenantes », n’ont pas vraiment identifié le besoin de coopération. Faire seul reste l’option première.

2. Conflit. Pas au sens de la bagarre ouverte, mais dans le frottement nécessaire pour caler les points de vue et les contributions. Les parties prenantes ont conscience que faire avec l’autre est nécessaire. Mais les gains, les coûts, les modalités de la coopération sont en cours d’exploration.

3. Le (petit) arrangement entre amis. La coopération repose sur la bonne entente, le Monde commun entre deux décideurs clés (Carlos G avec Carlos G, c’était effectivement plus facile 😊). C’est François Mitterrand avec Helmut Kohl. Mais elle se limite justement à ce rapport « familial » et disparait quand l’un des acteurs quitte le terrain de jeu.

4. La mise en place d’une intersection commune entre les deux Mondes. Chacun reste différent mais la zone de coopération existe bien, structurée par des processus d’interaction et de décision plus ou moins stricts. C’est par exemple la relation client fournisseur construite dans la durée par des processus d’achat et par une connaissance réciproque des capacités et des critères.

5. L’appartenance à un même Monde. Un cran plus loin, c’est l’appartenance des différentes parties prenantes à un même Monde Commun. Ce Monde « macro » peut englober les deux Mondes en présence. Cela peut aller jusqu’à la fusion au sein d’un Monde commun unique. Le groupe La Poste est un exemple intéressant sur ce plan car il fait coopérer des métiers très différents comme La Banque Postale et Géopost dans un même Monde de Coopération.

Cette échelle des accords de plus en plus coopératifs est celle que vont devoir « grimper » Renault et Nissan.  Aujourd’hui, je les perçois plus au stade 1 (chacun parle du bout des lèvres), voire 2 (le sujet est instruit sérieusement sur des terrains de jeu utiles).  L’espérance est sans doute d’atteindre le niveau 3 grâce à la création d’une confiance entre des personnes qui s’engagent des deux côtés pour réussir des premières coopérations concrètes.  Au-delà, la pente risque d’être très raide et les tentations centrifuges trop fortes ?

Quels enseignements pour nous tous qui tentons de coopérer le plus efficacement possible ? J’en cite 3.

1.      Expliciter très clairement l’Ambition commune et pourquoi chaque partie a besoin de l’autre

2.      Explorer sans concession la position actuelle sur l’échelle des Accords, sans tabou, sans discours politique

3.      Sur cette base construire un chemin factuel pour vous hisser ensemble à l’échelon supérieur

 


Le Monde Marchand est trop souvent le parent pauvre des six Mondes de références
qui nous permettent de cartographier visuellement les Mondes en présence au sein d’une organisation, ou entre deux organisations qui doivent coopérer. Nous avons réalisé une analyse Monde sur les leviers de motivation des équipes Corporate Banking d’une grande banque Européenne : Paris, Londres, Bénélux. Paris s’est révélé être la moins marchande des équipes. L’esprit Français est souvent plus Intellectuel que Marchand. Que ce soit dans l’inspiration, l’industriel, le civique, il préfère les idées, les concepts et répugne à leur mise en œuvre pragmatique, pour gagner quoi qu’il en coute.

 

C’est pourquoi l’exemple de Blaise Pascal, le philosophe du XVII siècle, est passionnant comme Passerelle entre ces deux Mondes

 

Il est à l’origine de plusieurs entreprises dont la plus significative fut la dernière, la création des « carrosses à cinq sols », c’est-à-dire du premier réseau de transport collectif intra urbain à Paris. Au XVIIème siècle, seules les personnes disposant d’un moyen de transport privé peuvent circuler rapidement dans la capitale. L’idée de Pascal consiste à créer un réseau de cinq routes, dont trois partent des Jardins du Luxembourg où il habite, pour permettre aux bourgeois de l’époque, pour une somme relativement modeste, de traverser Paris à leur guise. Cette innovation qui fut un immense succès populaire, datée de 1662, lui rapportait l’équivalent d’un revenu annuel de 250 000 euros, preuve par le résultat financier du succès de l’opération. 


Plus de deux siècles avant que Taylor ne s’intéressât au management scientifique, quels enseignements Marchand pouvons-nous extraire de ces aventures pascaliennes ?


1.    Segmenter son marché. Pascal vise les bourgeois qui n’ont pas les moyens de vivre comme les gentilhommes mais qui grâce à l’équivalent de dix euros y parviennent, en roulant à leur tour en carrosse. Nous sommes sur  un segment « milieu-haut de gamme »

2.     Fixer un prix qui fait sens pour l’acheteur. Pascal a vécu un échec avec sa machine arithmétique du fait de son prix exorbitant qui en limita l’expansion (on ne liste aujourd’hui que 9 exemplaires de cet objet dans le monde sur les 20 construits). Pour ce nouveau projet le prix n’est pas fixé au hasard puisqu’il correspond « au montant de la solde journalière d'un soldat, ou encore le prix d'un acte médical comme la saignée ». En bref une tarification qui tient compte d’un seuil psychologique.

3.     Communiquer dans le Monde de l’autre. Avec sa machine arithmétique, Pascal insistait sur son caractère exceptionnel. Au contraire, le carrosse à cinq sols est présenté comme « les coches à la campagne » : Il met l’accent sur le caractère banal, sur le fait qu’il s’agit d’une commodité offerte à tous, qui s’inscrit dans les mœurs et les coutumes de l’époque.

4.     Définir son modèle opérationnel : Pascal externalise tout ce qu’il peut, aussi bien la fabrication, grâce à un réseau d’artisans normands, que la distribution. Il tient les deux bouts de la chaîne, maîtrisant l'extrême amont (la conception du produit) et l’extrême aval (la communication vers le public) » comme peut le faire Apple ou Nike

5.     Surveiller la qualité de l’execution. Pascal ne confond pas son œuvre théologique avec cette expérience marchande. Car ici il n’invente rien : le transport en commun existe dans déjà dans d’autres villes. Mais il innove, ce qui n’est pas la même chose. « La disposition des matières est nouvelle » écrit-il dans une pensée. « Quand on joue à la paume c’est une même balle dont joue l’un et l’autre, mais l’un la place mieux »

6.     Penser grand : « scalable » dirions-nous en langage start-up. L’expansion régionale et internationale du concept, était en discussion au moment de la mort de Pascal.

 

Quand le Monde Civique rejoint le Monde Marchand, alors la création de valeur est optimale.

Avec ce projet devenu un succès public, le philosophe démontrait deux choses qui ne doivent plus nous surprendre trois siècles plus tard :

1) l’approche Marchande des méthodes de gestion n’a pas attendu le XXème siècle pour apparaître, elles existaient déjà au XVIIème

 2) la notion de « raison d’être » d’une organisation non plus : cette opération commerciale, était aussi une entreprise charitable visant à donner au peuple la possibilité de vivre comme des Princes, rouler en carrosse.


A vous de jouer en approfondissant vos Mondes Marchand et Civique ensemble, au lieu de les opposer

 

Laurent Dugas

 

Voir Les Minutes de Port-Royal, du Professeur Philippe Sellier :

  https://www.amisdeportroyal.org/societe/index.php/les-minutes-de-port-royal-videos/


« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres » Antonio Gramsci ((1891-1937)
Nous vivons une période qui peut correspondre à cette citation. Notre Monde, historique, fait de la résistance, malgré la prise de conscience de la finitude de nos ressources et du réchauffement climatique induit par notre activité croissante. Simultanément nous peinons à concevoir un nouveau Monde qui nous permettrait de survivre.
Entre les deux, si nous n’y prenons pas garde, les risques de « Monstres », Mondes violents, inadaptés, existent, comme le prouvent des guerres que nous n’aurions pas crues possibles il y a deux ans. Aujourd’hui pour la première fois de l’histoire humaine nous risquons de nous trouver en exil de notre propre Monde, devenu invivable.
A son échelle modeste, c’est l’enjeu de P-VAL dans sa démarche « Monde Meilleur ». Crée en 1994, P-VAL s’est positionné dès 2008 sur la création de Mondes auxquels les personnes ont envie d’appartenir. Jusqu’à présent nous l’avons fait au service de nos clients : vous voulez un Monde Agile ? parfait ! Un Monde de croissance B2B ? En route ! Un Monde Low-cost ? Allons-y ! …
Aujourd’hui nous voulons dépasser cette approche en guidant nos clients vers un Monde Meilleur. Pour expliciter ce que veut dire Monde Meilleur, nous convions nos consultants et des clients, amis, relations à des ateliers de philosophie pour ouvrir le champ de réflexion.
Nous partageons ici les grandes lignes de l’atelier du 18 octobre.
Notre atelier du 27 septembre a mis en évidence qu’un Monde devient meilleur s'il est rendu plus commun et durable. Mais tous les Mondes méritent-ils de durer et d'être partagés ?
La première qualité d’un Monde Meilleur est sans doute d’être un Monde qui est le moins injuste possible, c’est-à-dire le moins destructeur possible. D'ailleurs, aucun Monde ne peut durer sans contenir un certain degré de justice. Prenons l’exemple du Monde des Bandits : si ces derniers sont injustes envers les Mondes qu'ils pillent, ils sont justes dans leur propre Monde : ils ne peuvent se comporter entre eux comme ils se comportent avec les autres.
Qu'est-ce qu'être juste ? On pourrait dire qu'être juste, c'est rendre à chacun ce qui lui est dû, comme Glaucon dans le Livre I de La République. C’est le principe du don et du contre donCependant, faut-il rendre un don à celui qui va mal l’exploiter et qui va peut-être commettre un acte de destruction ? Emerge alors une autre justice, rendre le bien aux amis et le mal aux ennemis. Cela devient alors une lutte de clans qui se résout dans la justice du plus fort, qui dicte sa loi. Toutefois, cette loi du plus fort ne peut pas non plus se développer sans un équilibre de justice, sauf à retomber dans notre histoire du Monde des Brigands et une violence croissante.
Pour quitter ce cycle d’injustice, nous pourrions penser qu'un gouvernement est juste s'il est un gouvernement de la Raison. C'est une hypothèse envisagée dans le Livre VIII de La République.
Le monde juste pourrait être dirigé par une aristocratie de la raison. L’expérience montre que ces personnes rationnelles ne sont pas à l’abri de leurs émotions. Elles s’engagent progressivement dans une timocratie dont la justice est guidée par l’affect. En se développant, cette justice de l’affect se corrompt et devient guidée par la fureur de se distinguer. L'absence de mesure dans la recherche de distinction conduit à l'injustice. C’est le triomphe de l’oligarchie qui vise l’accumulation pour l’accumulation. Par son avidité cette oligarchie sape elle-même sa durabilité en mécontentant une part croissante de la population. La "démocratie du désir" naît alors, où chacun cherche à s'enrichir, où tous se permettent tout, et où il n’y a plus d’ordre : à chacun sa justice.
Ce qui conduit à l’émergence d’un Tyran qui assure un retour à l’ordre en imposant son désir comme loi. Le règne de l'injustice recommence.
L’évolution de pays comme la Corée du Nord, la Chine, la Russie, les USA qui semblent s’éloigner de la justice des pères fondateurs et nos démocraties européennes est révélatrice de ces tensions cycliques.
Nos Mondes sont Meilleurs s’ils se rapprochent le plus possible d’un idéal de justice. C’est-à-dire qu’ils s’autorisent le moins d’injustices possibles, s’ils maintiennent une distinction mesurée. Plus ils ont justes, plus ils peuvent durer et devenir communs.
Autour de cette idée nous avons exploré trois questions :

  1. Comment définir ce qui est juste pour un Monde, alors qu’il semble traversé par une pluralité de conceptions de la justice ?
  2. Un Monde qui instaurerait la justice en son sein mais qui serait injuste envers les autres Mondes est-il un monde meilleur ?
  3. Comment un Monde juste peut-il devenir plus durable et commun s'il se situe parmi des Mondes injustes ?

Enfin une autre question émerge naturellement, celui de l’exercice du pouvoir pour créer un Monde Meilleur.
En effet, transformer son Monde actuel pour le rendre Meilleur, plus juste, passe par la réduction du pouvoir de sa caste dirigeante. Alors que c’est justement cette caste qui bénéficie du Monde actuel. L’exemple de Michael Gorbatchev est éclairant. En ouvrant l’URSS avec la Glasnost, il a sapé son propre pouvoir.  
Comment réinventer son Pouvoir sans le perdre ? C’est une question implicite que nous rencontrons souvent avec nos clients décideurs qui ont construit leur pouvoir dans le Monde actuel et qui ont la clairvoyance et le courage de voir que ce Monde doit évoluer sous leur propre impulsion
« Monde Meilleur et Pouvoir » est un excellent sujet à aborder lors d’un prochain Atelier Philosophique de P-VAL !
 

 


Nous vivons une période qui peut correspondre à cette citation d'Antonio Gramsci ((1891-1937).

Notre Monde, historique, fait de la résistance, malgré la prise de conscience de la finitude de nos ressources et du réchauffement climatique induit par notre activité croissante. Simultanément nous peinons à concevoir un nouveau Monde qui nous permettrait de survivre

Entre les deux, si nous n’y prenons pas garde, les risques de « Monstres », Mondes violents, inadaptés, existent, comme le prouvent des guerres que nous n’aurions pas crues possibles il y a deux ans. Aujourd’hui pour la première fois de l’histoire humaine nous risquons de nous trouver en exil de notre propre Monde, devenu invivable.

A son échelle modeste, c’est l’enjeu de P-VAL dans sa démarche « Monde Meilleur ». Crée en 1994, P-VAL s’est positionné dès 2008 sur la création de Monde auxquels les personnes ont envie d’appartenir. Jusqu’à présent nous l’avons fait au service de nos clients : vous voulez un Monde Agile ? parfait ! un Monde de croissance B2B ? en route ! un Monde Low-cost ? Allons-y ! …

Aujourd’hui nous voulons dépasser cette approche en guidant nos clients vers un Monde Meilleur.

Pour expliciter ce que veut dire Monde Meilleur, nous convions nos consultants et des clients, amis, relations à des ateliers de philosophie pour ouvrir le champ de réflexion.

 

Nous partageons ici les grandes lignes de l’atelier du 27 septembre.

Un Monde Meilleur est un Monde qui vise à instituer une harmonie entre des éléments disparates : le monde (kosmos en grec), est un arrangement harmonieux, qui s’oppose au chaos (khâos en grec). Quels que soient nos efforts d’harmonisation, le chaos croissant est inévitable, selon le principe d’entropie (augmentation du désordre). Il n’y a donc pas de Monde Parfait, immuable, mais on peut essayer de faire au mieux, sans oublier que le chaos est à l’œuvre, engendrant toujours plus d’incertitudes : par exemple, le prix du pétrole est de moins en moins prévisible.

Pour trouver une harmonie, notre Monde a besoin de limites. Toute communauté habitant un Monde commun doit donc définir quelles sont ses propres limites et ses fins.

Rousseau nous invite à penser la communauté à partir de l’amour de soi, que tout être humain ressent. La communauté s’étend par cercles concentriques grâce à un vécu commun, à des règles et des affects en partage. Plus le cercle est étendu, plus les liens affectifs et réglés qui nous unissent aux autres risquent de devenir distendus, abstraits, désincarnés. Pouvons-nous penser des rapports affectifs et réglés à l’échelle cosmopolitique ? Comment articuler le local et le global, en matière d’affects et de règles en commun ?

Machiavel met en évidence que le bien commun peut se réaliser à la condition que des intérêts pluriels (parfois antagonistes) s’expriment et se limitent réciproquement. La confrontation des positions différentes peut faire naître un but commun, qui donne une orientation à un Monde commun.

À partir de ce cadre de pensée, nous pouvons penser deux questions dans notre transformation vers des Mondes Meilleurs :

1.      Jusqu’où devons-nous étendre le Monde commun, sachant qu’il pourrait se dissoudre si nous l’étendions trop ? Un département de l’entreprise, un niveau hiérarchique, toute l’entreprise, certains clients, tous les clients, tout l’écosystème ? Il conviendrait de penser différentes formes de participation permettant aux membres du Monde de partager en commun des affects et des règles, en évitant le péril, pointé par Rousseau, d’une logique de la représentation.  Cette logique amènerait chacun à chercher à se distinguer de ses rivaux : le Monde commun encourrait le risque de se dissoudre en factions isolées.

2.      Jusqu’où devons-nous organiser les énergies autour d’un but commun ? Il conviendrait de trouver un projet commun, qui ne se réduise pas à l’expression de quelques valeurs communes, et qui puisse être contesté et amendé. Le risque à éviter, selon Machiavel, est celui d’une disparition de l’intérêt commun sous l’effet de la flatterie et de la corruption.

En guise d’ouverture de notre prochain atelier du 18 octobre, nous pouvons nous demander, à l’instar de Socrate, quels sont les Mondes qui méritent de durer et d’être partagés en commun :

Tous les Mondes se valent-ils ? La première qualité d’un Monde Meilleur est sans doute d’être un Monde qui est le moins injuste possible, c’est-à-dire le moins destructeur possible. Peut-être faut-il chercher à être un Monde plus juste, avant de viser à être un Monde plus commun ou plus durable ?

Laurent Dugas


Que faut-il penser de la polémique sur les déplacements en avion du PSG ? 

En quoi peut-elle nous concerner en tant que managers dans nos entreprises ? 

Et que révèle-t-elle de nos MONDES ? Comment gérer ces situations dans nos contextes professionnels ? Comment créer une dynamique positive dans une situation aux injonctions contradictoires ?

Premier enseignement l'humour seul ne fonctionne pas !

Autant que j'ai pu comprendre l'enchainement :

  1. Alain Krakovitch, dirigeant de Voyages SNCF (TGV) fait un coup de pub à son offre de transport en invitant le PSG à aller à Nantes en TGV au lieu d'y aller en avion (malin ;),
  2. Question des journalistes à Christophe Galtier qui répond par un trait d'humour "pourquoi pas en char à voile ?" ( il fallait y penser ...),
  3. Puis réactions et condamnations en boule de neige des réseaux sociaux, des politiques et des journalistes,
  4. Jusqu'à l'obligation faite à Galtier de faire amende honorable quelques jours plus tard,
  5. Et la conséquence pour tous de ne plus jamais se risquer à une blague sur ce sujet.

Analysons comment la tectonique des MONDES© se met en place.

Quel rôle devait jouer l'humour ici ? 

Celui de répondre par l'absurde pour inviter l'auditoire à réfléchir au sujet : oui, pourquoi le PSG préfère prendre l'avion et pas le train ou le bus ? 

Si nous réfléchissons quelques minutes, nous trouvons tous une foule de bonnes raisons : délais cumulés de sportifs sous contraintes permanente de récupération, sécurité en gare et dans le train, stars hypermédiatisées avec tous les risques induits, etc. 

Poussons à l'extrême : pourquoi l'équipe de France 1998 est allée de Clairefontaine au stade de France en bus privé et pas en transport en commun ?  

Bref, le débat pourrait être clos avec la conclusion pour le PSG de se poser la question pour optimiser sa consommation d'énergie dès que possible dans son champs de contraintes bien spécifique.

Mais cela ne fonctionne pas du tout comme cela car un Monde Civique & Opinion se met en route

Cette association Civique - la recherche du bien commun - avec Opinion  - la maitrise du message, de l'image et des canaux de communication - devient dangereuse si elle occulte les autres Mondes, en particulier le Monde Industriel - comment fonctionne le système - et le Monde Marchand - comment agir avec pragmatisme pour gagner.

Or, c'est justement ce qui se passe : ce duo Civique - Opinion constitue une sorte de dictature qui empêche d'argumenter "rationnellement" sur ces registres Industriel et Marchand, car toute tentative est disqualifiée comme s'opposant à la finalité Civique sur laquelle pourtant tous sont d'accord.

Nous sommes soumis presque chaque jour à ce mécanisme dans nos entreprises. 

Je prends un exemple de P-VAL sur un enjeu de recrutement.  Nous sommes en cours de recrutement d'une femme de 45 ans qui a besoin de retrouver un travail après avoir géré enfants et mari pendant de longues années et qui apporte son envie et sa maturité sur un poste qui demande une main de fer dans un gain de velours. 

Nous partageons le sujet et recevons une objection de collaborateurs "ce n'est pas RSE, vous auriez du prendre un jeune alternant". 

Le débat a été riche  : nous avons décortiqué les registres Civique, Marchand, Industriel de la décision pour aboutir ensemble au bien fondé du choix initial ( de l'intérêt d'avoir des outils communs MONDE pour traiter des sujets aussi chargés de représentations personnelles).

Mais imaginez que le débat se soit retrouvé sur les réseaux sociaux, repris par des personnes publiques plus ou moins bien intentionnées ?

Donc que faire face à de telles situations qui peuvent déraper rapidement ?

Pour être concret, je vous propose une piste de communication :

  1. Se synchroniser avec l'autre Monde sur la finalité Civique : le but est de désamorcer la virulence du blocage par le couple Civique - Opinion pour ouvrir le raisonnement,
  2. Argumenter sur les registres opérationnels Marchand et Industriel : c'est la grande difficulté car il faut que le Monde de l'Opinion vous laisse la place. A chaud lors de l'entretien avec les journalistes, c'est encore possible. 
  3. Converger vers une solution acceptable, quitte à ajuster positivement le choix initial,
  4. Solliciter le Monde de l'Inspiration pour un trait d'humour final qui permet à tous de reprendre du recul et de sortir positivement et légèrement du débat.

Appliquer au PSG cela pourrait donner  :

  1. Oui, nous nous posons la question de notre consommation d'énergie sur tous les sujets, dont le transport de notre équipe première,
  2. Nous avons des contraintes spécifiques d'enchainements de compétitions, de récupération physiques et psychiques, 
  3. Nous avons des joueurs hyper médiatisés dont chaque sortie présente un risque donc des enjeux de sécurité, de privatisation des espaces, ....
  4. Après analyse, l'avion demeure le moyen de transport le plus adapté sur ce type de distance, si plus court nous prenons le bus,
  5. Pour vous montrer que nous pensons à tout nous avons même exploré la piste du char à voile ;)

Qu'en pensez-vous ?

Ceci est facile à froid et très difficile à chaud. C'est pourquoi nous proposons des formations et des entrainements pour "Communiquer pour faire agir sur des situations complexes"

Intéressé ? Contactez Gabrielle de Lachapelle par mail: : gabrielle.delachapelle@pval.com


PS : l'image n'est pas le PSG en route vers Nantes, mais l'équipe P-VAL en séminaire vers un repos bien mérité après une course effrénée sur les plages à virer de bord au ras des vagues !

 

Stellantis a dévoilé en janvier dernier les grandes lignes d’un accord global (ou somme d’accords) avec le géant du numérique Amazon. Il s’agit d’une coopération d’un nouvel ordre dans laquelle les constructeurs automobiles historiques semblent contraints de s’associer avec les GAFA pour accélérer leur transformation technologique. 

Il est intéressant d’analyser les facteurs clés de cette coopération.

Si l’on se met dans les bottes de Stellantis, le moteur fondamental de cette coopération est l’atteinte d’un objectif ambitieux : « devenir une Tech Company ». Pour y parvenir Stellantis faisait face à 2 scénarios.

Le premier scénario consistait à continuer seul. Avec la quasi certitude, d'évoluer lentement, d'avoir des difficultés à attirer les top talents TECH, de les noyer dans son Monde historique "voiture", de décider de manière non pertinente par défaut de maitrise des enjeux, ... Bref pour être toujours en retard face à des compétiteurs plus ouverts et agiles

Pour « devenir une Tech Company », Stellantis a donc retenu un 2ième scénario. L’entreprise a fait le pari d’un partenariat de coopération avec Amazon. Toutefois, en faisant ce choix, subsiste le risque important que la vraie tech company reste Amazon car c’est elle qui détient les compétences et les moyens d’investir. Mais c'est un risque à prendre.

Il faut comprendre ici que Stellantis a fait le choix de la coopération pour répondre à un impératif stratégique ambitieux. « Devenir une Tech Company » est l’objectif le plus ambitieux du constructeur automobile, c’est l’objectif qui adresse directement sa « raison d’être ». En revanche, pour Amazon, il semble que le deal n’a pas la même ampleur. Le géant du web n’a pas besoin de Stellantis pour satisfaire sa raison d’être.

Toutefois, on constate qu’il y a ici coopération « malgré » les freins parce que l’objectif est majeur, au moins pour l’un des acteurs.



Equilibré ou Gagnant-gagnant ?


Carlos Tavares dit que le partenariat est gagnant-gagnant ; c’est sûrement vrai. L’équation économique - Voitures électriques contre Cockpit digital et hébergement cloud – est sans doute gagnant pour chaque partie. Cela confirme qu’une coopération est nécessairement un partenariat gagnant-gagnant, où chaque acteur considère que le gain de la coopération est supérieur à son coût.

En revanche, dire que la relation est équilibrée semble davantage un effet de communication. Nous avons d’une part Stellantis pour qui la coopération est vitale et d’autre part, Amazon pour qui elle est seulement marchande. Si nous prenons l’image de l’omelette au lard, Stellantis est le cochon et Amazon, la poule.

Ces accords engagent (et valorisent) les grands chefs mais c’est dans le détail de leur réalisation que se situe la performance réelle.

Cela n’est pas du tout une affaire gagnée : le choc des deux Mondes est assuré et il n’est pas certain qu’ils parviennent à trouver un Monde commun de coopération.

L’enjeu est de parvenir à créer des Passerelles entre des équipes très différentes en termes de culture, de compétence, de reconnaissance, …Bref deux Mondes très différents. A terme, la coopération sera un succès durable si elle parvient à créer un Monde commun qui englobe les équipes des deux entités en proposant une enveloppe culturelle commune qui permet de régler les désaccords de manière fluide.

Pour poser les bases du Monde Voulu de Coopération pour et par Stellantis, voici les quatre rubriques à préciser :

GRANDEUR

Celle d’une tech company : ce qui demande à être explicité car le slogan est très utilisé. Il recouvre des idées de vitesse, d’agilité, de capacité à coder mieux que les autres, de réponse digitale aux besoins clients quitte à les anticiper, ...

RECONNAISSANCE

C’est un enjeu pour les personnes de Stellantis : elles prennent le risque de quitter la reconnaissance existante pour sauter dans une aventure, quitte à ne pas rester une fois leurs compétences acquises et évoluer vers de « vraies tech companies » davantage capables de les développer et de les rémunérer.

INTERACTIONS

Celles du Mode agile, et plus surement celles du partenaire Amazon que l’on peut analyser comme un archétype (cf nos archétypes by P-Val) d’un Monde industriel focalisé sur le client.

DECISION

C’est sans doute la partie la plus complexe pour éviter un empilement des « besoins » et un cockpit « impossible ». Il faut construire une gouvernance robuste capable de décider vite, malgré un leadership bicéphale.

Enfin Carlos Tavares, avec justesse, met l’accent sur l’enjeu de pouvoir que constitue la maitrise de la relation client.

Il considère que le propriétaire de la voiture restera fidèle à sa marque de voiture, ce qui est vrai à court terme. Amazon considère sans doute qu’à moyen terme le conducteur voudra un « smart cockpit Amazon » et qu’il vivra d’abord une expérience client digitale avant de vivre celle procurée par les 4 roues et un moteur électrique (cf. les basculements Intel inside ou les choix d’OS de smartphone Apple ou Android). L'avenir nous dira ce qui devient majeur pour le client.

En synthèse, retenons que les accords de coopération stratégiques, comme les JV et les Fusions ne fonctionnent durablement que si l’objectif est ambitieux pour dépasser ce que chacun aurait pu faire seul, que le calcul *bénéfices - coûts* est positif et enfin que les acteurs opérationnels parviennent à penser et agir dans un même Monde commun. 

C’est notre engagement dans toutes nos missions de coopération.








 


Comment sauver le lait bio ?

Perçu comme une bouée de sauvetage par de nombreux producteurs lors de la crise post-quotas en 2015-2016, le lait bio est victime d'une crise de surproduction depuis quelques mois. Trop cher, pas assez différent en termes de goût et concurrencé par des laits locaux et des petites marques artisanales, il a fait les frais d'un retournement de marché. Au point que les plus grands groupes, dont Lactalis et Sodiaal, ont entrepris de le déclasser.

Pris dans cette tourmente, Biolait, le précurseur du lait bio né il y a trente ans de l'initiative de producteurs engagés dans une agriculture paysanne, espère avoir trouvé une solution de sauvetage partiel. Biolait réunit 2 500 producteurs et collecte 30 % du lait bio en France.

Il a créé la première filière de poudre de lait bio et équitable pour le chocolat avec deux autres coopératives, le chocolatier Ethiquable, qui vient de quitter l'Italie pour le Gers, et Ingredia, un spécialiste de la production d'ingrédients innovants - tels que les poudres laitières fonctionnelles et des actifs naturels nutritionnels.

Le lait sera transformé en poudre par Ingredia dans les Hauts-de-France à partir du lait de Biolait. En effet, pour garantir la longue conservation du chocolat et obtenir une texture fondante, l’usage de lait en poudre est indispensable pour la fabrication. Ingredia travaille depuis 70 ans à la valorisation du lait en ingrédients destinés aux fabrications agroalimentaires, à la nutrition et à la santé.

Ethiquable, lui, produit 25 millions de tablettes par an, ce qui lui donne une part de marché de 25 % du chocolat bio vendu en GMS en France. La part du bio dans les tablettes n'est que de 2 %.

Créer une filière « verticale » est un point faible de l’agroalimentaire Français

Pourquoi ? Parce qu’il faut coopérer entre acteurs qui apportent des valeurs ajoutées différentes, donc qui incarnent des métiers différents, voire des Mondes différents, et nos tendances « Domestiques » sont autant de barrières à franchir.

Biolait, avec Ethiquable et Ingredia, ont chacun monté les barreaux de l’escabeau des objectifs pour atteindre une ambition commune : une filière de poudre de lait bio et équitable. Cette ambition est une idée nouvelle qu’il faut concevoir en dehors de ses habitudes et de ses compétences actuelles. C’est donc un changement de Monde qui sollicite plusieurs dimensions :
- la Décision : avec une gouvernance pour piloter la filière et lui trouver d’autres débouchés dans le temps.
- les Interactions : pour que celles-ci soient efficaces afin que chaque partie tienne sa place,
- la Reconnaissance :  que l’on peut focaliser ici sur l’obtention d’un ratio Bénéfices/Coûts positif.
- de nouvelles Grandeurs métier : sur l’importance de penser Filière verticale versus développement horizontal.
Pour illustrer ce Monde « vertical », un Geste comme « Je respecte mes engagements, avant de me poser la question de ce que fait l’autre » est essentiel pour assurer un fonctionnement fluide.

Sans partager le détail des accords, notez que le lait Biolait sera acheté aux conditions du commerce équitable garantissant un prix unique toute l'année. Pour le chocolatier Ethiquable cela lui permet de sécuriser son image Bio et son coût d’approvisionnement dans la durée. Pour Ingredia c’est un deal plus Marchand qui lui permet de vendre sa technologie.

En conclusion, l’intensité de l’Accord entre les Mondes des différents acteurs est clé sur le long terme. Le risque serait de rester à un « petit arrangement » entre les patrons des entités existantes. Il faut voir à l’épreuve des faits si la coopération initiée se traduit en Passerelles durables. In fine la coopération verticale peut conduire à un Monde commun, via une intégration verticale – comme la grande coopérative Basque Mondragon – ou d’autres formules juridiques comme des Joint Ventures. P-Val peut vous accompagner ainsi dans tous vos projets de coopération, de l’idée initiale au montage opérationnel.

 

 

Une image contenant texte, herbe, extérieur, cheptel

Description générée automatiquement

 


Les clients nous demandent souvent : "Les Mondes, c'est très bien, nous comprenons, cela motive nos équipes, nos clients le sentent, mais est-ce que cela nous fait vraiment gagner ?"

Je suis fan de foot et j'ai vécu deux soirées exceptionnelles mardi et mercredi avec la Ligue des Champions. Je vais parler du Real Madrid, mais je pourrais dire la même chose de Liverpool.

Depuis trois tours - Paris, Chelsea, Manchester City - le Real gagne, on ne sait pas comment. Hasard des rebonds, joueur exceptionnel,  effondrement émotionnel de l'équipe adverse ?

Ah ! Ce dernier point nous donne la clé : il semble à chaque fois que le club adverse qui mène largement, qui domine dans le jeu, s'effondre. Alors que ce devrait "normalement" être l'inverse. Le Réal ne s'effondre JAMAIS. Et ça, ce n'est pas un joueur, ce n'est pas une équipe, ce n'est pas un club, c'est une institution, c'est un MONDE au sens P-VAL.

Un Monde, c'est une culture en action qui se transmet de génération en génération. 

Barcelone a le moto "Mas que un club". C'est vrai pour le Real et ce n'est pas vrai pour ses trois derniers adversaires : ils ont des budgets pharamineux, des entraineurs de renom, les meilleurs joueurs de la planète, ils ont une équipe expérimentée, mais ils n'ont pas, pas encore, un Monde de Performance bien ancré.

Alors, pouvons-nous approcher ce Monde de Performance du Réal ?

Le sujet mérite une étude approfondie (je vais appeler Florentino Perez ;), mais voici quelques pistes à murir. Un Monde se définit par 4 grandes rubriques (nous consulter pour le détail).

GRANDEUR : gagner la Ligue des Champions est "naturel", normal. Le club est programmé pour être le plus grand. Il pense et agit "excellence", à chaque instant.

RECONNAISSANCE : si vous venez au Real, c'est pour gagner la Ligue des Champions. C'est le seul club qui peut vous le "promettre". C'est pourquoi Mbappé va venir au Real, quelque soit l'argent que le PSG lui promet. Et c'est la même chose pour tous les joueurs. Un joueur vient et reste au PSG pour l'argent, il va au Real pour gagner. Cela change tout.

INTERACTION : c'est une alchimie difficile à analyser de l'extérieur. Je vais dégager une anecdote révélatrice. Il y a quelques temps, Benzema a déclenché une polémique en disant à l'arrière latéral Mendy "Ne passe pas le ballon à Vinicius (leur ailier hyper rapide), il joue contre nous". Aujourd'hui Benzema et Vinicius s'entendent comme larrons en foire et tous les centres de Vinicius sont pour Karim. Cela veut dire que les joueurs du Real ne se mentent pas sur la performance, ils se disent les choses directement, cash, pour le bien de l'équipe et cela marche.

DECISION : un club prend des dizaines de décisions chaque jour. Il les prend en fonction de son âme, de son Monde de performance : pas de Monde de Performance, pas de bonnes décisions dans la durée, demandez à Léonardo au PSG. Hier soir, l'entraineur Carlos Ancelotti a sorti ses 3 milieux de terrains stars, historiques, pour trois jeunes de 10 ans de moins chacun. Il l'a fait naturellement, car les joueurs sont préparés, le savent.

Pensez à ce Monde du Réal pour votre propre équipe, votre entreprise. C'est votre Monde de performance qui vous fera gagner dans la durée, rien d'autre.

Je vous quitte car Guardiola m'appelle ;)

Laurent

Laurent.dugas@pval.com

La Coopération est un levier de performance dont le potentiel a longtemps été sous-estimé ou galvaudé (nous sommes partenaires !). Pour se développer, les entreprises ont plutôt misé sur leurs propres ressources organiques ou choisi de faire des acquisitions.

Mais les défis économiques, technologiques ou sociétaux sont tels que « faire seul » est devenu sinon une stupidité ou une impasse, en tout cas une voie trop lente et trop chère. Pour faire face à nos défis, nous devons apprendre à coopérer. Pour les anthropologues c’est d’ailleurs LA compétence qui a permis à l’homo sapiens de réussir. Nous, leurs descendants, avons donc en nous ce potentiel et cette envie. Aujourd'hui, nous devons apprendre à la faire ressurgir et à la développer à une échelle aussi ambitieuse que celle qui a permis à nos ancêtres de survivre au froid, à la faim et aux bêtes sauvages.

L’exemple emblématique de coopération réussie est l’ISS

L’idée de la Station Spatiale Internationale a germé sous Reagan. Devant l’ampleur de la tâche, les USA ont embarqué le Canada, le Japon puis l’Europe. Et quand la destruction en plein vol de Challenger les a privés de lanceur pour de nombreuses années, l’administration Clinton s’est alors ouverte aux Russes. Ils avaient un lanceur fiable capable d’emporter des charges importantes et beaucoup d’enjeux dans l’espace. C’est ainsi que l’ISS est née et a assuré une présence habitée dans l’espace continue depuis 22 ans. Pourtant les freins à la coopération étaient légions : stratégie, langage, culture, technologie, politique, économie, propriété intellectuelle. Même la guerre entre la Russie et l’Ukraine n’a pas stoppé cette coopération. Ce qui va mettre fin à l’ISS est sans doute la projection vers une station lunaire et son usure structurelle.

Quelles sont les conditions de réussite consubstantielles de l’ISS qui peuvent éclairer nos coopérations terriennes ?

1.      Le point pivot d’une coopération est la convergence des objectifs de chaque acteur vers un objectif supérieur plus ambitieux encore. Il permet de fédérer et de booster les objectifs de chacun. C’est l’image de l’escabeau. En montant sur la première marche chacun de leur côté, les deux acteurs ne peuvent atteindre qu’un objectif limité et très loin de celui de l’autre. En montant jusqu’en haut de l’escabeau, les deux acteurs vont se rejoindre sur un objectif chapeau beaucoup plus ambitieux et commun : apprendre à vivre durablement dans l’espace. Les objectifs « en dessous » sont spécifiques pour chacun : préparer une mission vers Mars, gérer de satellites, tester des matériels.

2.      La certitude que l’on a besoin de l’autre. Coopérer génère plutôt des interactions agréables mais ce plaisir n’est pas une fin en soi. On coopère parce que l’on doit le faire pour être plus performant. Chaque partenaire a des moyens de financement et des savoir-faire uniques indispensables à la réussite du projet. Les Russes apportaient ce qu’ils avaient développés pour la station Mir et en particulier les technologies de ravitailleurs. Les Européens leur technologie et leurs idées d’expériences scientifiques.

3.      Le prix à payer est plus faible que le gain. Toute coopération va générer des efforts, des renoncements, des arbitrages douloureux. Il faut donc s’assurer que le bénéfice final soit supérieur au prix à payer. Plus le gain est fort, plus le coût de la coopération est acceptable. Et plus la coopération est une habitude, plus son coût devient faible. Nous en reparlerons dans un autre article.

Ces trois Lois sont essentielles pour poser les fondements de votre projet de coopération, mais pas suffisantes. Elles doivent s'ancrer dans une culture en action , un MONDE. Nous détaillerons ce Monde de Coopération dans de futurs articles. Ici je met l'accent sur deux Mondes de références essentiels à la coopération et à ces 3 lois  :

-        Le Monde de l’Inspiration : pour « trouver » l’objectif ambitieux partageable il faut réfléchir en dehors du cadre existant, il faut voir plus haut, plus loin, différemment.

-        Le Monde Marchand : la coopération doit permettre de gagner. Elle est pragmatique, opportuniste pour tirer parti des contextes. Elle n’est surtout pas bureaucratique, ce n’est pas un système à faire fonctionner.

Ces 3 Lois + 2 Mondes doivent vous aider à questionner vos envies ou vos idées de coopération, et à poser les bases de votre Monde de Coopération.

Dans de prochains articles, nous vous donnerons d’autres clés et d’autres exemples de coopérations réussies.

 

Laurent Dugas

Laurent.dugas@pval.com

 



Culture toxique et démission : une corrélation mise en lumière par le MIT

Une étude publiée par le MIT sur 500 entreprises et 34 000 salariés fait apparaitre les causes de la "Great Resignation" qui a lieu aux Etats Unis. En effet, entre avril et septembre 2021, plus de 24 millions d'Américains ont quitté leur emploi. C'est un record absolu difficile à expliquer. Ce phénomène n'a pas la brutalité US en France, mais il existe aussi et il constitue un enjeu important pour les entreprises. 


L'étude du MIT fait apparaitre des écarts très importants selon les secteurs d'activité, avec aussi de forts contrastes au sein d'un même secteur - par exemple, dans le secteur financier, le taux de démission est de 5,1% chez HSBC alors qu’il s’élève à 15,2% chez Goldman Sachs.

L'étude montre ensuite que les causes majeures de départs sont liées à la culture de l'entreprise, bien plus qu'au facteur Rémunération. 


L'analyse de ces causes de départ n'est pas évidente

Une culture toxique

C'est un concept assez large, traduisant que le collaborateur sent qu'il ne peut pas s'épanouir dans cette entreprise et qu'il voit qu'une majorité d'autres pensent la même chose. Une culture toxique est fondamentalement une culture qui annonce des valeurs et fait le contraire dans la pratique. Elle dit "bienveillance" mais, dans la pratique, elle fait vivre un climat de peur, elle dit "empowerment" mais, dans la pratique, elle stigmatise toute prise de risque, etc. 

Notre expertise MONDE analyse bien cela : quand le Monde est désaccordé entre la Grandeur, la Reconnaissance, l'Interaction et la Décision, le Manager et le collaborateur sont perdus. Cette dissonance parfois faible au début devient vite toxique au cours du temps. Des changements de cap stratégique, d'équipe dirigeante, des fusions, ... sont autant d'événements qui mettent à mal la stabilité d'une culture d'entreprise, pour le meilleur comme pour le pire.

 

Les autres leviers sont de fait corrélés à ce premier élément, au sens où ils sont des révélateurs de dysfonctionnements plus importants

Insécurité sur l'emploi et les réorganisations

Ces deux éléments amènent forcément chacun à se demander si ce n'est pas le bon moment pour bouger et voir si l'herbe n'est pas plus verte ailleurs. Ce sont aussi des signaux que la culture de l'entreprise est en train de partir en ficelle. Les réorganisations ne font souvent que complexifier l'exercice du métier sans apporter de réelles manières de faire autrement. Faites-en 3 en 5 ans et vous perdrez vos équipes qui ne savent plus où elles habitent.

Haut niveau d'innovation

Ce facteur semble surprenant, tellement la dimension innovation est valorisée dans les entreprises. L'explication semble résider dans la pression, l'exigence et la charge de travail que ces entreprises très innovantes font porter sur les collaborateurs. Elles usent leurs collaborateurs à toute vitesse, et comme elles ont une bonne image, se replacer chez un suiveur moins dévorant est chose aisée.

Défaillance dans la reconnaissance de la performance des employés

C'est une composante directe d'un Monde et ce point rejoint directement le premier : une entreprise dont la boucle de reconnaissance est défaillante devient vite toxique pour les performants qui vont alors voir ailleurs.

Non prise en compte du Covid

Cela semble un facteur très US ; en France, j'ai plutôt l’impression que les entreprises sont exemplaires. L'étude pointe que le phénomène de la « Great Resignation » s’est développé simultanément à la pandémie de Covid. Dans un contexte de crise sanitaire, la gestion inadaptée des dirigeants (l’absence de politiques sanitaires et la non prise en compte de la santé des salariés) a été un important catalyseur de démissions.

 

En synthèse, retenons que si le MONDE, qui organise la culture de votre entreprise sur les 4 piliers Grandeur, Reconnaissance, Interactions et Décision, est bien aligné sur votre Stratégie business et sur les attentes de vos équipes alors votre taux de départ sera faible au sein de votre secteur d'activité. Si, en revanche, votre Monde est désaccordé alors vous serez dans la fourchette haute des départs. Il ne s'agit pas d'apporter une réponse par le discours, les pseudo baromètres ou une communication "Marque Employeur". Il s'agit de revisiter votre MONDE avec rigueur et de le rendre tangible par des preuves concrètes, au quotidien, par des Gestes observables et des actions simples mais vraies.


Laurent Dugas