P-VAL accompagne ses clients dans leurs enjeux de performance. Cela sur les thèmes qui sont au cœur de leur stratégie : simplicité, agile, coopération, empowerment, innovation … sont des demandes que nous devons traiter avec eux. 

Pour cela nous co-construisons leur Monde Meilleur, celui qui répond à leur stratégie, avec le souci de valider que ce Monde nouveau répond à une exigence de Commun, Durable, Juste et Performant.

Créer un Monde « Agile » est une demande récurrente aujourd’hui même si ce mot prend des notions différentes selon les contextes et les interlocuteurs. Nous avons formalisé un Monde archétype pour nourrir nos clients : le Monde de Spotify.


Ici nous partageons un éclairage très intéressant sur la mise en œuvre ambitieuse d’Orange France, avec Odile de Gabrielli .

Bonjour Odile, vous avez été directrice des Programmes d’Orange France. Dans ce cadre vous avez conduit une démarche de transformation importante pour passer d’un Monde projet classique, avec cycle en V et séparation claire entre DSI et Métiers, à un Monde Agile. Quelles ont été les motivations de cette transformation ?

Les projets de développement chez Orange France représentent plusieurs centaines de millions de CAPEX par an. Nous avons identifié trois axes de progrès :

Délivrer plus vite. Nos projets duraient en moyenne 24 mois. C’est trop long dans un environnement aussi mouvant que le nôtre qui nous oblige à réagir rapidement face à une concurrence dynamique.

Réduire les coûts de développement. La durée est toujours un facteur consommateur de ressources, mais surtout nous avions identifié que nous développions parfois des fonctionnalités trop peu utilisées.

Mettre le client au cœur de nos projets. Orange par son histoire, ses parts de marchés, sa structure de coûts, son positionnement nous impose d’offrir un service premium, et donc une satisfaction client au top du marché.

C’est ce qui nous a décidé à lancer un vaste projet de transformation agile mené en commun entre l’IT et le métier, un moyen de progresser à la hauteur des enjeux qui sont les nôtres.

Les transformations agiles sont à la mode, mais elles peinent parfois à démontrer leur impact. Comment avez-vous piloté cette transformation, avec quels objectifs ?

Nous l’avons conduit en nous fixant des objectifs ambitieux en termes d’enjeux et de gains. Pour partager quelques ordres de grandeurs, nous avons l’objectif de passer en 4 ans de 5% de projets agiles à 85%. Nous voulons baisser nos coûts de développement de 18%, et créer 15% de valeur incrémentale supplémentaire sur nos projets

Nous avons beaucoup consulté d’autres entreprises pour s’inspirer de leurs bonnes pratiques et éviter quelques erreurs de débutants. Merci à eux. Mais nous avons eu une approche différente dès l’origine car nous ne sommes pas partis de la DSI qui se lance dans l’agile comme c’est souvent le cas, au risque de rester au sein de la DSI. Dès le début nous avons conçu un programme agile commun aux Métiers et à la DSI avec un co-sponsoring Métier /DTSI

Nous avons mis en place un accompagnement très fort des équipes, aménagés des locaux adaptés à l’agile, et lancé un vaste programme de formation

Quelles difficultés non prévues avez-vous rencontrées ?

Nous sommes partis à fond dans notre nouveau Monde Agile, mais il a vite été perçu comme en opposition avec les fonctionnements existants. Cela a été particulièrement difficile pour les personnes, en particulier les managers, qui étaient aux frontières du dispositif car elles étaient écartelées entre des fonctionnements nouveaux et d’autres fonctionnements anciens qui perduraient.

Nous avons donc dû adapter la gouvernance en renforçant les comités transverses pour assurer la cohérence et la fluidité entre les silos d’une organisation que nous n’avons pas transformés. Ne pas changer l’organisation était un parti pris dès l‘origine car cela aurait généré une transformation complexe et lente, bref pas agile.

Nous avons aussi accompagné les équipes avec un plan de formation ambitieux qui a impliqué plus de 5000 personnes pour expliquer les nouveaux rôles et repositionner des managers volontaires sur la nouvelle fonction pivot de LPM « Lean Portfolio Manager », nos « Product Owner » en langage agile.

Quel est l’enseignement majeur que vous souhaitez transmettre ?

J’en aurais deux.

Le premier est de traiter le sujet comme un changement culturel, un changement de Monde au sens de P-VAL, et non pas comme un chantier technique ou d’organisation. Ce sont véritablement les modes de pensée et d’action qui doivent changer. Il faut donc investir vite et massivement sur cet axe dès le début, avant que les mauvais plis ne soient pris.

Le deuxième est de toujours prioriser les actions au regard de la valeur créée pour les deux parties : le Client et Orange. Ce n’est pas facile à estimer, à valoriser en euros. Mais c’est essentiel pour que les enjeux de pouvoir ou la bureaucratie ne brident pas le changement lancé.

Merci Odile ! Je suis certain que nous aurons l’occasion de partager cette expérience avec nos clients qui se lancent dans la création de Mondes Agiles auxquels toutes leurs parties prenantes voudront appartenir !

Laurent

L'AGILE est à la mode mais reste très complexe à déployer au delà de la DSI, et encore. Odile de Gabrielli partage avec nous des pistes pour faire de cette transformation Agile un succès. #transformation #agile #mode #monde #orange #performances

 


Le secteur automobile est structurellement Coopératif et pourtant ...

En effet il est dicté par des effets de taille très importants. Il faut massifier pour amortir les investissements. L’indicateur clé est le nombre de voitures produits. Les usines doivent pouvoir produire des voitures de différentes marques. Et la liste des coopérations à organiser au sein d’un même groupe comme entre groupes concurrents qui s’allient sur un sujet précis (moteurs, batteries, électronique, ..) pourrait etre étendue aisément.

Alors comment comprendre l’histoire qui suit ?

Carlos Tavares, CEO de Stellantis réuni son premier comité de direction issu de la fusion PSA – FIAT et déclare à ses managers, patrons des marques et des fonctions transverses « Cooperation is bullshit, you are Competitors ».

Les managers sont restés cois. Ils se sont regardés mutuellement, sans trop bien décrypter les conséquences de cette déclaration. Et connaissant la main de fer de Carlos Tavares ce n’était pas une boutade : quel membre allait disparaitre le premier de ce cénacle, dévoré par la concurrence interne ?

Carlos Tavares est parfaitement conscient de l’absolue nécessité de coopérer, mais pas à n’importe quel prix

Il est pleinement conscient de la nécessité de coopérer en interne comme avec des concurrents ou des groupes très différents.  Il l’a montré par exemple en voulant s’engager avec Amazon sur la conception du cockpit digital des voitures.

Mais ce qu’il ne veut pas c’est que la coopération soit un prétexte à un déficit de performance.

Prenons une situation simple, dans laquelle l’un de vos managers vous dirait : « Comme j’ai voulu coopérer avec telle entité pour le bien global du groupe, j’ai renoncé à acheter ces composants moins chers à l’extérieur… »

Que répondez-vous à cela ?

a)    « Tu as raison le gain global est positif car l’entité avec laquelle tu as coopéré a pu assurer sa rentabilité … et ainsi tu as contribué à augmenter l’Harmonie entre les managers au sein du groupe »

b)    « Tu as tort car ainsi tu as, d’une part trop payée ce qui a un impact sur la marge de tes véhicules, et d’autre part tu n’as pas incité l’autre entité a faire les efforts radicaux pour se situer au niveau du marché concurrentiel… et ainsi tu as contribué à une perte de Puissance au sein du groupe »

Carlos a clairement choisi la deuxième réponse b). C’est la plus dure, la plus exigeante pour la communauté managériale. C’est la réponse la moins « intellectuelle » : pas de savant calcul d’optimisation aux bornes du groupe. « Prend le bénéficie tout de suite, on verra ensuite ». C’est le Monde Marchand à fond, avant même le Monde Industriel.

Nous ne sommes pas tous des Carlos Tavares 😊 et nos entreprises, nos managers, sur le long terme ont un réel besoin d’harmonie. Comment trouver le bon équilibre ?

Je vous propose une approche plus modulable de la coopération : Puissance x Harmonie

Visualisez notre matrice Puissance x Harmonie et réfléchissez aux quatre cases ainsi constituées. La case idéale est bien sûr Puissance forte et Harmonie forte, celle à éviter à tout prix est sa symétrique. Ce sont les deux autres cases qui sont intéressantes selon la dynamique qu’elles génèrent.  Ainsi Carlos Tavares favorise nettement la case Puissance forte et Harmonie faible.

Par son expérience et ses méthodes, P-VAL Conseil vous guide dans la dynamique de vos coopérations. JV, Offre transverse, Synergie opérationnelle, Filière métier, Articulation filiales, ...

Nous construisons ensemble votre propre Monde de Coopération, celui qui répond à votre stratégie, avec une approche pragmatique sur les quatre cases de cette matrice


Laurent Dugas

Président P-VAL Conseil

 


Le Monde de Laurent Berger : un leader au croisement des Mondes Civique et Marchand, là où se construisent les compromis entre rapport de force et intérêt général.

L'équilibre de ces deux Mondes, souvent antagonistes, pourrait être un résumé pertinent de la capacité à faire des réformes dans l’univers public, ou des transformations dans les entreprises ?

Le numéro un de la CFDT passe la main à sa remplaçante, Marilyse Léon, après 25 ans de militantisme. Nous analysons son Monde personnel, au sens de l’approche de P-VAL, pour comprendre les points forts et peut etre les zones d’ombre de son action. Cet exemple de leadership  peut nous inspirer au-delà du contexte syndical.

« Laurent Berger, c’est l’école du nous » déclare l’un de ses mentors. Mais attention, ici ce nous n’est pas clanique. Il ne traduit pas le poids d’un Monde Domestique. Il renvoi plus au Monde Civique comme l’a illustré le fonctionnement de l’intersyndicale constituée autour de la réforme des retraites : mettons de côté nos différences, nos poids respectifs pour faire réussir ce collectif. C’est l’abandon du Monde Domestique de chaque syndicat pour une cause commune. C’est la base d’un Monde de Coopération capable de construire des accords solides entre les parties.

Le mot «école » est aussi très révélateur. Il renvoie à l’apprentissage, aux essais et erreurs, au progrès. Ce fonctionnement « nous » est un chemin, un apprentissage permanent et complexe. Ce pragmatisme renvoi à un Monde Marchand qui veut gagner, et qui s'en donne les moyens mais qui ne va pas s'enfermer pour gagner ou perdre seul, "à tout prix". Ce Monde Marchand dynamise le Monde Civique pour trouver des compromis.

Effectivement un Monde de Coopération se construit, s’apprends et demande des efforts concrets pour sceller progressivement des accords.

Mais le Monde de Laurent Berger ne se limite pas à ces deux dimensions Civique et Marchande. Tout comme le nécessite un Monde Coopération efficace, Laurent Berger a une forte présence dans le Monde de l’Inspiration. C'est ce Monde qui permet de voir des accords, là où les autres ne voient que conflits. C’est ce qu’il reproche à Emmanuel Macron « il n’a pas compris qu’il y avait potentiellement un coup à jouer ».

Son gout de la rupture, de l’innovation, se retrouve dans sa projection après sa carrière syndicale. Il veut faire autre chose, et pour y réfléchir il va partir une semaine seul sac au dos en bretagne. Là encore l’inspiration est une « école » qui se travaille.

Au-delà de ces trois Mondes majeurs pour une coopération efficace - Civique, Inspiration et Marchand  - comment se positionne Laurent Berger sur les trois autres Mondes : Domestique, Industriel, et Opinion ?

-       Le Monde de l’Opinion est très présent. Il est utilisé avec adresse dans les médias. Mais son impact médiatique est plus la conséquence d’une posture équilibrée, trop rare aujourd’hui, qu’une volonté délibérée d’être visible. Ainsi quand il se projette sur son futur travail, il dit rechercher « un boulot où on ne se sert pas de mon nom comme trophée ». Effectivement dans un Monde de Coopération il faut énormément écouter, questionner, parler pour construire avec l’autre. La mise en avant de son égo est un piège qui éloigne les autres d’autant qu’il est fort.

-       Le Monde Domestique est limité par la culture de la CFDT qui met à la « retraite opérationnelle » relativement tôt ses dirigeants et ne les recase pas dans des organisations parallèles. Il ne veut dépendre de personnes « je ne vais pas demander à être reclassé par le président ou le gouvernement ». Il ne cherche pas de petits arrangements entre amis, petits arrangements qui peuvent faire parti des tactiques de coopérations mais qui ligotent trop souvent les parties prenantes et les empêches de se développer sur des accords plus exigeants.

-       Enfin le Monde Industriel semble être celui qui lui a manqué dans une vie syndicale qui brasse beaucoup de paroles et d’agitations sans toujours avoir un impact réel. C’est ce qui semble le guider pour la suite « j’ai envie d’être opérationnel dans une entreprise ou une ONG, un boulot qui a un impact ».

C’est sans doute la grande limite de cet univers syndical qui reste au bord de la piscine de la vraie vie et se positionne plus comme un accompagnateur critique, agaçant et utile de la vie sociale. Mais ce n’est pas lui qui construit.

Or un Monde de Coopération doit développer sa dimension industrielle pour assurer sa durabilité, sa capacité à produire une performance, avoir des impacts concrets.

Avec ce décryptage Monde j’ai l’impression de connaitre Laurent Berger que j’aurais plaisir à rencontrer. Je lui souhaite de poursuivre son parcours avec une dimension Industrielle pour s’accomplir comme un leader exemplaire d’un Monde de Coopération auquel les autres veulent appartenir

Laurent Dugas

Cette analyse s’appuie sur :

 l’article des Echos https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/exclusif-laurent-berger-je-ne-veux-pas-avoir-a-demander-quoi-que-ce-soit-a-ceux-qui-nous-gouvernent-1953794

le livre « Transformer autrement : créer votre Monde de Performance » : https://www.amazon.fr/Livres-Laurent-Dugas-Bruno-Jourdan/s?rh=n%3A301061%2Cp_27%3ALaurent+Dugas+et+Bruno+Jourdan




Le nouvel accord de coopération Renault-Nissan évoque pour moi la comptine enfantine « Un pas en avant … ». En effet je ne suis pas sûr que les acteurs sachent vraiment s’ils ont avancé ou reculé, au-delà des discours de façade.

L’accord qui prévalait auparavant, le RAMA (« Restated Alliance Master Agreement »), aux contours byzantins, ne tenait que par l’incarnation du pouvoir par un homme fort, Carlos Ghosn. Aujourd’hui, « place à la normalité » comme le dit Jean-Dominique Senard.

L’accord quitte désormais un monde Domestique, « le chef a dit », pour un Monde Civique, « la norme ». Le Monde domestique, qui a laissé se développer les dérives connues, avait le mérite de l’informel : « Carlos a dit … » suffisait pour débloquer des budgets, l’utilisation de brevets, … sans tomber dans un formalisme juridico technocratique. Demain, l’explication de « qui fait quoi, avec quels moyens, avec quel contrat, … » sera peut-être plus saine mais surtout plus longue.

Que faut-il alors penser des perspectives de coopération autour de ce nouvel accord ?

La première pierre d’une Coopération est une ambition forte, fédératrice qui dépasse les intérêts de court terme des parties prenantes.  

L’accord parle de « projets opérationnels à forte création de valeur ». La liste est longue mais elle n’engage que ceux qui voudront vraiment les réaliser. Le nouvel accord prône une union libre entre les deux constructeurs sans but commun fédérateur si ce n’est des intérêts bien compris au coup par coup.

Dans ce contexte, où le sens commun est limité, tout va reposer sur la manière dont les Managers vont fonctionner, c’est-à-dire dans quel Monde les Manager vont penser et agir.

Et là, il faut tenir compte du passé qui a laissé des traces « C’est comme si on demandait à 10 000 couples divorcés de se remettre ensemble » comme le dit un décideur dans un article récent des Echos.

Par ailleurs, si cet accord se vit dans le Monde Civique avec une armée de juristes et de comptables, il a fort peu de chances de produire les résultats escomptés.

Pour éviter cette situation, la tentation serait de vivre la coopération dans un Monde Marchand, purement transactionnel, au cas par cas, où le plus fort à l’instant donné gagne, au risque de favoriser une opposition systématique.

Par exemple, autrefois les grands marchés étaient partagés selon une règle « Leader Follower » et l’imprimatur de Carlos Ghosn. Demain, le fonctionnement annonce « une mise en concurrence saine » entre les deux équipes. Sous la pression des résultats imposés à chaque partie, la concurrence risque de quitter rapidement le terrain du gentleman agreement pour devenir insidieuse voire frontale.

L’équilibre entre ces deux Mondes Civique et Marchand qui se critiquent volontiers ne va pas être simple à construire et à faire vivre.

Il va demander une gouvernance très précise, une « poigne de folie » selon les mots d’un décideur. Mais il va surtout exiger un Monde Commun, même diffus, pour permettre des approches de type « don et contre don », en dehors d’un système comptable et juridique. C’est par exemple le sujet de la mise à disposition des brevets de chacun des groupes. Si Renault semble prêt à jouer le jeu de la mise en commun, il semble que Nissan soit beaucoup plus réticent.

En effet, la coopération nécessite la prise de conscience objective du besoin de l’autre. « Je ne peux pas atteindre seul mon objectif (qualité, coût, délai, ...) et donc j’ai besoin de l’autre, même si je ne l’aime pas ». Comme les Russes et les Américains l’ont fait et le font toujours, pour le succès de la station orbitale internationale, l’ISS.

Si Lucas de Meo semble conscient de ce besoin, tout en voulant rester le plus libre possible, le patron de Nissan, Uchida, ne se livre pas et va devoir composer avec des visions isolationnistes fortes.

La question posée ici est celle de l’intensité de la coopération, qui dépend bien sûr des parties prenantes. Pour évaluer cette intensité nous proposons notre échelle des accords de coopération, de 1 à 5.

1. Pas de coopération. Les parties, pas encore « prenantes », n’ont pas vraiment identifié le besoin de coopération. Faire seul reste l’option première.

2. Conflit. Pas au sens de la bagarre ouverte, mais dans le frottement nécessaire pour caler les points de vue et les contributions. Les parties prenantes ont conscience que faire avec l’autre est nécessaire. Mais les gains, les coûts, les modalités de la coopération sont en cours d’exploration.

3. Le (petit) arrangement entre amis. La coopération repose sur la bonne entente, le Monde commun entre deux décideurs clés (Carlos G avec Carlos G, c’était effectivement plus facile 😊). C’est François Mitterrand avec Helmut Kohl. Mais elle se limite justement à ce rapport « familial » et disparait quand l’un des acteurs quitte le terrain de jeu.

4. La mise en place d’une intersection commune entre les deux Mondes. Chacun reste différent mais la zone de coopération existe bien, structurée par des processus d’interaction et de décision plus ou moins stricts. C’est par exemple la relation client fournisseur construite dans la durée par des processus d’achat et par une connaissance réciproque des capacités et des critères.

5. L’appartenance à un même Monde. Un cran plus loin, c’est l’appartenance des différentes parties prenantes à un même Monde Commun. Ce Monde « macro » peut englober les deux Mondes en présence. Cela peut aller jusqu’à la fusion au sein d’un Monde commun unique. Le groupe La Poste est un exemple intéressant sur ce plan car il fait coopérer des métiers très différents comme La Banque Postale et Géopost dans un même Monde de Coopération.

Cette échelle des accords de plus en plus coopératifs est celle que vont devoir « grimper » Renault et Nissan.  Aujourd’hui, je les perçois plus au stade 1 (chacun parle du bout des lèvres), voire 2 (le sujet est instruit sérieusement sur des terrains de jeu utiles).  L’espérance est sans doute d’atteindre le niveau 3 grâce à la création d’une confiance entre des personnes qui s’engagent des deux côtés pour réussir des premières coopérations concrètes.  Au-delà, la pente risque d’être très raide et les tentations centrifuges trop fortes ?

Quels enseignements pour nous tous qui tentons de coopérer le plus efficacement possible ? J’en cite 3.

1.      Expliciter très clairement l’Ambition commune et pourquoi chaque partie a besoin de l’autre

2.      Explorer sans concession la position actuelle sur l’échelle des Accords, sans tabou, sans discours politique

3.      Sur cette base construire un chemin factuel pour vous hisser ensemble à l’échelon supérieur

 


Le Monde Marchand est trop souvent le parent pauvre des six Mondes de références
qui nous permettent de cartographier visuellement les Mondes en présence au sein d’une organisation, ou entre deux organisations qui doivent coopérer. Nous avons réalisé une analyse Monde sur les leviers de motivation des équipes Corporate Banking d’une grande banque Européenne : Paris, Londres, Bénélux. Paris s’est révélé être la moins marchande des équipes. L’esprit Français est souvent plus Intellectuel que Marchand. Que ce soit dans l’inspiration, l’industriel, le civique, il préfère les idées, les concepts et répugne à leur mise en œuvre pragmatique, pour gagner quoi qu’il en coute.

 

C’est pourquoi l’exemple de Blaise Pascal, le philosophe du XVII siècle, est passionnant comme Passerelle entre ces deux Mondes

 

Il est à l’origine de plusieurs entreprises dont la plus significative fut la dernière, la création des « carrosses à cinq sols », c’est-à-dire du premier réseau de transport collectif intra urbain à Paris. Au XVIIème siècle, seules les personnes disposant d’un moyen de transport privé peuvent circuler rapidement dans la capitale. L’idée de Pascal consiste à créer un réseau de cinq routes, dont trois partent des Jardins du Luxembourg où il habite, pour permettre aux bourgeois de l’époque, pour une somme relativement modeste, de traverser Paris à leur guise. Cette innovation qui fut un immense succès populaire, datée de 1662, lui rapportait l’équivalent d’un revenu annuel de 250 000 euros, preuve par le résultat financier du succès de l’opération. 


Plus de deux siècles avant que Taylor ne s’intéressât au management scientifique, quels enseignements Marchand pouvons-nous extraire de ces aventures pascaliennes ?


1.    Segmenter son marché. Pascal vise les bourgeois qui n’ont pas les moyens de vivre comme les gentilhommes mais qui grâce à l’équivalent de dix euros y parviennent, en roulant à leur tour en carrosse. Nous sommes sur  un segment « milieu-haut de gamme »

2.     Fixer un prix qui fait sens pour l’acheteur. Pascal a vécu un échec avec sa machine arithmétique du fait de son prix exorbitant qui en limita l’expansion (on ne liste aujourd’hui que 9 exemplaires de cet objet dans le monde sur les 20 construits). Pour ce nouveau projet le prix n’est pas fixé au hasard puisqu’il correspond « au montant de la solde journalière d'un soldat, ou encore le prix d'un acte médical comme la saignée ». En bref une tarification qui tient compte d’un seuil psychologique.

3.     Communiquer dans le Monde de l’autre. Avec sa machine arithmétique, Pascal insistait sur son caractère exceptionnel. Au contraire, le carrosse à cinq sols est présenté comme « les coches à la campagne » : Il met l’accent sur le caractère banal, sur le fait qu’il s’agit d’une commodité offerte à tous, qui s’inscrit dans les mœurs et les coutumes de l’époque.

4.     Définir son modèle opérationnel : Pascal externalise tout ce qu’il peut, aussi bien la fabrication, grâce à un réseau d’artisans normands, que la distribution. Il tient les deux bouts de la chaîne, maîtrisant l'extrême amont (la conception du produit) et l’extrême aval (la communication vers le public) » comme peut le faire Apple ou Nike

5.     Surveiller la qualité de l’execution. Pascal ne confond pas son œuvre théologique avec cette expérience marchande. Car ici il n’invente rien : le transport en commun existe dans déjà dans d’autres villes. Mais il innove, ce qui n’est pas la même chose. « La disposition des matières est nouvelle » écrit-il dans une pensée. « Quand on joue à la paume c’est une même balle dont joue l’un et l’autre, mais l’un la place mieux »

6.     Penser grand : « scalable » dirions-nous en langage start-up. L’expansion régionale et internationale du concept, était en discussion au moment de la mort de Pascal.

 

Quand le Monde Civique rejoint le Monde Marchand, alors la création de valeur est optimale.

Avec ce projet devenu un succès public, le philosophe démontrait deux choses qui ne doivent plus nous surprendre trois siècles plus tard :

1) l’approche Marchande des méthodes de gestion n’a pas attendu le XXème siècle pour apparaître, elles existaient déjà au XVIIème

 2) la notion de « raison d’être » d’une organisation non plus : cette opération commerciale, était aussi une entreprise charitable visant à donner au peuple la possibilité de vivre comme des Princes, rouler en carrosse.


A vous de jouer en approfondissant vos Mondes Marchand et Civique ensemble, au lieu de les opposer

 

Laurent Dugas

 

Voir Les Minutes de Port-Royal, du Professeur Philippe Sellier :

  https://www.amisdeportroyal.org/societe/index.php/les-minutes-de-port-royal-videos/